Le temps des barricades et des confrontations avec les CRS appartient au passé. L’avenir des Zadistes ne s’inscrit plus dans la lutte, mais dans l’enracinement. Chacun ayant admis que le fameux Ayraultport ne voit le jour qu'après l'épuisement du dernier recours. «Il en reste 921 dans notre besace !» nous précise Camille, porte-parole de la zone d'aménagement différé, ou selon les occupants, la zone à défendre (ZAD).
NOTRE DAME DES LANDES, CURIOSITE TOURISTIQUE ALTERNATIVE
Les Zadistes souhaitent montrer un nouveau visage : «Une société nouvelle, écologique et bienveillante et... juste et solidaire... et fraternelle et éclairée…et aussi responsable et autonome…et libertaire, et créative…et…et » bafouille Camille emporté dans son enthousiasme. «La ZAD est un véritable incubateur, une expérience collective qui montre qu’une autre voie est possible. Nos expériences en sont la preuve, c’est ce que nous souhaitons enfin montrer à tous ces chacals soumis à la botte du grand capital…Heu...pardon, à nos futurs visiteurs» précise Camille, tout en nous fixant de son profond regard bleu saignant.
Camile, porte-parole auto-déclaré de la ZAD
LE VOYAGE-VOYAGE A LA NORME BBC
En 2020, les offices de tourisme des grandes métropoles se verront imposer la norme BBC : Bourgeois-Bohème-Canaille. Jean Balèze ne semble pas vraiment emballé. Il nous avoue ne pas avoir eu le choix. «L’offre du Voyage-Voyage doit attirer le portefeuille du Bourgeois assuré d'un parcours sans danger, tout en amusant le Bohème avec de l’art jusqu’à en dégueuler. La norme Canaille, plus contraignante, nous impose désormais de produire un frisson de danger et une petite perle de sueur dans le parcours du touriste». Le Voyage-Voyage anticipe donc cette mise aux normes avec un peu d’avance. Jean Balèze est résigné : «Nous ne faisons qu'anticiper un phénomène inéluctable. Que ce soit Christiana à Copenhague ou Tachles à Berlin, tous ces lieux alternos, ces squats, ont finis par être spoliés et asservis à la société du spectacle, du grand consumérisme et de la spéculation immobilière» lâche-t-il dans un éclat de rire machiavélique. Et lorsque l’on rebondit sur Marseille et le GR 2013 qui passe à travers les quartiers nord, Jean soupire: «Bon, bah, voilà. J’crois que c’est clair». Il ajoute en ricanant:«Allons, allons, aucun touriste ne revient aujourd'hui du Brésil sans évoquer une anecdote frémissante à propos de sa visite d'une favela...»
Christiana à Copenhague et Tacheles à Berlin, squats et lieux autogérés historiques
LAISSEZ VOUS TENTER PAR L'ANARCHIE
Le visiteur est invité à découvrir les joies anarchistes d’un lieu autogéré et réfléchir à son propre conditionnement. Car dans la ZAD, il n’y a ni Dieu, ni Maître. D’abord méfiants à l’idée d’accueillir des étrangers, les habitants de la ZAD ont fini par accepter l’idée d’une ouverture sur le monde. «Nous souhaitons nous montrer constructifs, tout en gardant nos idéaux et notre liberté. Nous obtiendrons bientôt le statut de ville libre, ce qui nous permettra de voter des lois qui sont propres à la communauté, comme la légalisation de la marijuana, même si celle-ci est déjà entérinée dans la pratique quotidienne» sourit Camille avant que son visage ne se referme soudainement, tout en jetant un coup d’œil paranoïaque autour de lui.
RECUP, DIY, LAND-ART, HERBERGEMENT INSOLITE ET NOURRITURE BIO
La ZAD a tout pour plaire.Tendance, elle ravira les amateurs de Mad Max. Logez dans l’une des nombreuses cabanes et retrouvez votre âme d’enfant (à partir de 120 euros la nuit). Arrêtez-vous dans un des snacks bio pour y déguster la spécialité de la ZAD : le sandwich à l’épeautre. Celui-ci vous garantit de ne prendre qu’un repas par jour. Visitez les nombreux ateliers d’artistes (sculpture sur déchets) ou de créateurs (la ZAD est « the place » pour les vêtements en feutrine). Déambulez Avenue de la Beuz et faites vos emplettes à consumer sur place. Emmenez vos enfants nourrir les nombreux chiens au chenil zoologique. N’oubliez pas de ramener un petit souvenir dans l’une des boutiques qui fleurissent un peu partout. Les cacahuètes issues du commerce équitable ne sont, en aucun cas, vendues pour être jetées aux résidents.
Cabanes insolites pour renouer avec la nature
Livres pour enfants, badges, mugs, t-shirts, porte clés, boules à neige, miel ou bière...made in Zad.
« LEONARD, CE CONNARD DE VINCI »
Du théâtre de rue pour storyteller la lutte de Notre Dame des Landes à travers l’histoire d’un jeune cadre dynamique de Vinci dont le destin va basculer. Voici le pitch : Léonard fait tout bien comme il faut, pense tout bien comme il faut. Baccalauréat, école de commerce, stagiaire chez Bouygues, salarié 3 ans pour Véolia et promu cadre pour Vinci, Léonard croise un jour Séverine son amour de jeunesse. Cette jeune fille fougueuse, éprise de liberté est Zadiste. Elle entraîne Léonard dans la lutte. Cette histoire d’amour impossible, primée à Aurillac, nous entraîne dans un tourbillon de réflexions, comme le miroir de nos contradictions face à nos aspirations.
" Léonard, ce connard de Vinci " : du théatre de rue vindicatif
OUI A L’AERODROME DE NDDL !
«C’est une dédiabolisation et une reconnaissance» reconnaît Camille. «Nous ne sommes pas vraiment préparés à recevoir tout ce monde, mais nous allons auto-gérer, comme d’habitude». Les premières enquêtes d’opinion le disent : nombreux sont les curieux qui souhaitent découvrir l’utopie concrète de la ZAD. Mais comment recevoir les touristes ? «Lors de la dernière AG, nous avons voté la construction d’un petit aérodrome. Ainsi que la création de la première compagnie aérienne anarchiste ou chaque passager est aussi pilote, steward et mécanicien. ». Les premières dessertes ne seront pour l’instant connectées qu’à d’autres ZAD, ce qui n’est pas sans décevoir Charlotte et Rémy, lutteurs de longue date, installés dans un tipi depuis 10 ans avec leurs 3 enfants : «C’est vrai qu’on serait bien partis à Dubaï, Monaco, Miami ou Venise…» soupire Charlotte tout en allaitant la petite dernière de 6 ans. «Mais la démocratie en a décidé autrement ! Nous devons respecter cela pour que nos idéaux et les raisons de nos luttes ne soient pas vaines».
Les ailes de l'enfer est la première compagnie aérienne anarchiste au monde
Les premiers vols s'effectueront à bord de ce Topolev Tu4 alimenté en huile de friture
Futur site de l'aerodrome de Notre Dames Des Luttes